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Soins d’urgence et évolution secondaire : Anoxie
cérébrale

Les causes d’anoxie cérébrale sont très diverses (voir « Anoxie cérébrale » ) ; il n’est pas possible d’envisager sur cette page la totalité des causes qui conduisent à une diminution ou à un arrêt de l’oxygénation du cerveau ; parmi les causes majeures ont déjà été exposées les deux plus fréquentes : les AVC et les traumatismes crâniens ;

  • dans l’AVC ischémique l’anoxie cérébrale est liée à l’interruption de la circulation cérébrale dans le territoire de telle ou telle artère à destinée de l’encéphale ;
  • dans le traumatisme crânien la circulation sanguine est entravée de façon aléatoire par les lésions et ses conséquences ;

dans ces deux cas l’anoxie y est rarement diffuse et homogène à l’inverse de ce qui se passe dans un arrêt cardiaque ou lorsque le sang artériel est envahi par un gaz empêchant la fixation de l’oxygène sur les globules rouges (intoxication par le monoxyde de carbone).

Ces deux dernières causes d’anoxies dites diffuses et dont il est ici question, mettent en danger la totalité des neurones de l’encéphale ; ces derniers sont extrêmement sensibles au manque d’oxygène qui, si il est complet les détruit en l’espace de 3 minutes environ ; par ailleurs les neurones sont les seules cellules de l’organisme à ne pas pouvoir se renouveler; l’anoxie cérébrale diffuse est une cause majeure de décès ou de séquelles neurologiques très lourdes.

LES ANOXIES CÉRÉBRALES PAR ARRÊT CARDIAQUE

Le cœur peut s’arrêter plus ou moins brusquement pour de très nombreuses raisons ; certaines sont secondaires à un blocage respiratoire (noyade, inhalation d’un corps étranger,insuffisance respiratoire majeure etc…) , d’autres en raison d’une perte sanguine non compensée (hémorragie), d’autres par action directement toxique (overdose, toxiques industriels), d’autres par action mixte (choc allergique qui atteint à la fois les fonctions respiratoire et cardiaque)….Toutes ces circonstances peuvent entraîner un arrêt du cœur et donc une anoxie cérébrale; chacune nécessite une prise en charge spécifique en plus du problème de l’arrêt cardiaque.

L’ arrêt cardiaque de cause cardiaque pur est souvent appelé « mort subite » lorsqu’il aboutit à un décès, ce qui est très fréquemment le cas (9 cas sur 10 environ) ; pour les survivants, 10% seulement sortiront de l’hôpital avec peu ou pas de séquelles. On estime le nombre d’arrêts cardiaques « purs » aux alentours de 50.000 par an en France ; ce qui aboutit à 5000 survivants dont 500 environ n’auront pas de séquelle ou seulement des séquelles mineures.

Les deux causes majeures de ces arrêts cardiaques purs sont l’infarctus du myocarde (IM) massif après 45 ans et les troubles du rythme d’origine génétique avant 45 ans ; cette règle est cependant loin d’être absolue, l’ IM restant en fait majoritaire chez les jeunes adultes.

Quoiqu’il en soit, le premier geste devant un arrêt cardiaque est d’essayer de rétablir artificiellement la circulation sanguine par le massage cardiaque pour tenter d’amener de l’oxygène au cerveau ; si les médecins, pompiers et secouristes y ont été formés, cela est beaucoup plus rare pour le reste de la population ; par ailleurs si le massage cardiaque seul est en mesure dans nombre de cas de faire « repartir » le cœur cela est loin d’être la règle et nécessite alors de recourir au choc électrique ; bien que ce geste soit assez simple faut-il encore avoir sous la main un poste de secours équipé, prendre le temps de lire les instructions : ce qui nécessite souvent d’être deux, l’un qui masse, l’autre qui s’occupe du défibrillateur ! tout en appelant le 15 !

Rappelons qu’il n’est pas nécessaire d’associer le bouche à bouche quand l’arrêt cardiaque n’est pas lié à une obstruction ventilatoire ; il est par contre bénéfique dans le cas contraire (arrêt cardiaque après noyade par exemple), mais le massage cardiaque reste primordial.

Ces indiscutables difficultés de prise en charge ultra-urgente (moins de 3 mn) expliquent en partie le faible nombre de patients en arrêt cardiaque pouvant être secourus (le chiffre des récupérations intra-hospitalières étant évidemment meilleur !).

Quand les patients ont pu bénéficier de ces manœuvres ils sont intubés et ventilés sur place par les équipes de secours et conduits dans un service de réanimation car ils sont alors généralement dans un coma dit « anoxique » et en état de choc.

Si l’arrêt cardiaque est du à un infarctus du myocarde il est nécessaire de faire – si le plateau technique de l’hôpital s’y prête (sinon le patient doit être transféré et à la condition qu’il soit transportable) – une coronarographie pour mettre en évidence une éventuelle obstruction coronaire traitable par revascularisation percutanée (les coronaires sont les artères du cœur et la coronarographie la radiographie de ces artères).

En dehors de ce problème spécifique (mais très fréquent puisque une coronarographie faite à tous les survivants d’un arrêt cardiaque extra-hospitalier montre que un sur deux est atteint d’une obstruction coronaire) les bases du traitement post-arrêt cardiaque sont : le traitement de l’insuffisance cardiaque (et du choc) et la neuro-protection :

le traitement de l’insuffisance cardiaque et du choc :

C’est la première mesure et la plus urgente, le pronostic neurologique étant impossible à préciser au tout début ; cette insuffisance cardiaque est en principe réversible (sauf pour certains infarctus du myocarde) et le traitement fait appel aux techniques habituelles : stimulation médicamenteuse du cœur, remplissage circulatoire et lutte contre la dilatation réflexe des vaisseaux sanguins (appelée vasoplégie) qui caractérise l’état de choc ; une assistance circulatoire par oxygénateur extracorporel peut s’avérer quelquefois nécessaire.

la neuroprotection :

C’est à dire la protection maximale du système nerveux particulièrement fragilisé ; en effet si les conséquences lésionnelles neuronales dépendent en grande partie de la durée de l’arrêt cardiaque et de l’efficacité des mesures de réanimation immédiate, l’atteinte du système nerveux se poursuit lorsque le cœur se remet à battre ; pendant l’arrêt cardiaque la diminution de l’apport d’oxygène au niveau du cerveau provoque des anomalies de fonctionnement de la membrane cellulaire des neurones ; lors de la reprise circulatoire ce dysfonctionnement permet la pénétration à l’intérieur de ces cellules de substances toxiques qui se sont accumulées pendant la phase d’arrêt cardiaque ; la destruction neuronale se poursuit ainsi un certain temps. De nombreux traitements médicamenteux ont été essayés pour limiter au maximum ce phénomène sans résultat évident actuellement ; la meilleure neuroprotection reste l’ hypothermie induite (refroidissement de l’ensemble du corps) dont on a pu prouver qu’elle multipliait par deux les chances de survie sans séquelles majeures ; cette hypothermie induite utilise :

  • le refroidissement externe
  • le blocage du réflexe de frisson par la curarisation : le frisson provoque en effet des saccades de contractions musculaires dont le rôle physiologique habituel est de réchauffer le corps ; les curarisants bloquant la contraction musculaire s’opposent donc à ce réchauffement physiologique.
  • les médicaments antipyrétiques (contre la fièvre)
  • des perfusions adaptées en température

Quand et comment formuler un pronostic en cas d’arrêt cardiaque réanimé ?

L’ établissement de ce pronostic ne peut pas être envisagé avant le troisième jour suivant l’arrêt cardiaque ; l’examen clinique pratiqué entre le troisième et le septième jour est le plus important pour le pronostic neurologique à condition que le patient ne soit plus sédaté cad calmé par les médications, par l’hypothermie ou des désordres métaboliques divers interférant avec l’état de conscience.

Si cet examen ne peut être fait dans de bonnes conditions on peut se baser sur :

  • la durée de l’arrêt cardiaque : une durée supérieure à 5 mn est de très fâcheux pronostic
  • l’hyperthermie : pour chaque degrés Celsius supérieur à 37° le patient voit son risque de décès ou de rester en état végétatif multiplié par deux
  • l’évaluation des réflexes du tronc cérébral après 3 jours : et notamment la persistance de l’abolition des réflexes pupillaire et cornéen
  • les potentiels évoqués : ils consistent en l’application d’un stimulus susceptible d’être détecté par le système nerveux d’un patient inconscient (comateux et/ou sédaté) et le recueil par des électrodes d’électro-encéphalographie d’ une éventuelle réponse électrique au niveau du cortex cérébral : les deux plus utilisées sont la stimulation sensitive au poignet (réponse N20) et la stimulation sonore aléatoire (MMN) ; bien que très intéressants les potentiels évoqués ne sont que des éléments d’appréciation parmi d’autres.

LES ANOXIES CÉRÉBRALES PAR INTOXICATION AU MONOXYDE DE CARBONE

Les causes et le mécanisme de l’intoxication monoxycarbonée sont décrits à la page correspondante. Il faut rappeler que ce gaz totalement inodore et présentant une affinité pour l’hémoglobine 220 fois supérieure à celle de l’oxygène est responsable de 5000 cas d’intoxications et de 100 décès par an en France ; sa toxicité est liée à la saturation immédiate des sites de fixation de l’oxygène dans les globules rouges qui ne peuvent plus dès lors le transporter dans l’ensemble du corps et notamment vers l’encéphale.

Suivant le degré d’intoxication et l’état antérieur du sujet il existe de nombreuses formes cliniques de gravité différente :

  • simples maux de tête au début, puis vomissements, troubles visuels, acouphènes et enfin impotence motrice empêchant de fuir.
  • puis apparition d’un coma avec teinte rosée des téguments et phlyctènes cutanées
  • enfin troubles du rythme cardiaque , collapsus et arrêt cardiaque
  • gravité majorée chez les personnes âgées , les insuffisants respiratoires, les sujets anémiques et la femme enceinte (en raison des risques encourus par le fœtus).
  • possibilité d’intoxication associée notamment dans les incendies où la combustion des matières plastiques peut ajouter le dégagement d’acide cyanidrique
    particulièrement toxique.

La conduite à tenir en urgence

est surtout de savoir évoquer cette intoxication puisque les circonstances sont particulières mais peuvent ne pas toujours attirer l’attention : en dehors de l’incendie penser que cette intoxication est possible devant toutes les combustions incomplètes (charbon, fuel, matières plastiques, propane et butane, bois) et d’autant plus quand l’ atmosphère est confinée : douches, salle de bain, chauffe-eau, braseros, poêles, moteurs de voiture dans un garage. Le gaz naturel ne contient pas de monoxyde de carbone mais peut entraîner une anoxie par privation d’air dans une atmosphère confinée. Dés que cette intoxication est suspectée il faut aérer tout de suite le local ou transporter la victime au dehors et appeler les secours (le 15 et/ou le 18 ; les pompiers étant parfois indispensables pour tarir la source de l’intoxication). Si le sujet est en arrêt cardiaque (ce qui se traduit par l’absence de respiration spontanée) il faut entreprendre un massage cardiaque externe associé au bouche à bouche (après avoir basculé la tête en arrière) qui peut apporter un peu de l’oxygène de l’air environnant. Si le sujet est
inconscient mais respire, il faut également basculer la tête en arrière pour dégager les voies aériennes, et en attendant les secours le placer en position latérale de sécurité pour éviter que des vomissements éventuels ne viennent noyer la trachée.

À l’arrivée des secours

l’oxygénation au masque ou après intubation est le traitement essentiel avant l’hospitalisation.

Après l’hospitalisation

l’oxygénothérapie est adaptée à l’état du patient, une mise en caisson pour oxygénothérapie hyperbare étant indiquée en cas de persistance des signes cliniques ou dans le cas particulier de la femme enceinte ; les indications de ce traitement en caisson seront d’autant plus larges que le service de réanimation est proche de ce centre (en l’occurrence ici le CHU de Bordeaux) ; mais si il nécessite un transport de longue durée il sera réservé à la persistance des signes neurologiques malgré une oxygénothérapie à haut débit et à la femme enceinte.

Les séquelles les plus fréquentes

quand elles existent sont les atteintes de la mémoire, les syndromes parkinsoniens, l’épilepsie, la cécité corticale (perte plus ou moins importante de la vue en rapport avec l’anoxie du cortex visuel) et des syndromes confusionnels, voire démentiels.

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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