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Rééducation dans le Traumatisme Crânien

Plan :

  • Introduction
  • Rééducation des déficiences motrices
  • Rééducation neuro-psychologique
  • Conclusion

Introduction

Passée la période de réanimation et d’éveil pendant laquelle une rééducation passive a déjà débuté (lutte contre les attitudes vicieuses, kinésithérapie respiratoire, changement positionnel, etc…) la rééducation proprement-dite ne peut vraiment commencer que lorsque le blessé a repris une certaine conscience de lui-même (sauf pour la rééducation de la motricité automatique : cf plus loin).

Dans un premier temps le blessé va se rendre compte de ses déficiences motrices mais pas de ses déficiences intellectuelles et accusera facilement l’équipe de la lenteur de sa récupération ce qui peut entraîner des conflits avec les familles. Si des liens solides ne se sont pas encore établis entre l’équipe et la famille cela peut conduire à des sorties d’institution très défavorables pour le blessé.

Dans un deuxième temps (rééducation acceptée) le blessé a réalisé la nécessité de cette rééducation mais il surestime souvent ses capacités et accepte mal d’être intégré à un groupe qu’il juge plus atteint que lui (ce qui bien- sûr n’est en général pas vrai !).

Dans un troisième temps (rééducation investie) il a enfin retrouvé des repères fiables et va alors adhérer à son groupe de travail auquel le lie désormais un sentiment d’appartenance, mais aussi parfois de compétition, motivation positive, mais que le rééducateur doit savoir gérer.

Ce qui importe le plus à ce stade c’est de rééduquer, non pas déficit par déficit, mais d’organiser un projet d’ensemble qui tienne compte de l’histoire du blessé (ce qu’il faisait avant, ce qu’il souhaitait faire, ses goûts, ses points forts, son milieu familial) ; bref en favorisant une approche globale (dite holistique) plutôt que découpée en déficiences isolées.

L’équipe de Château-Rauzé a fait le choix depuis longtemps d’une prise en charge en groupe pour favoriser la stimulation et la resocialisation des blessés ; les groupes constitués doivent être le plus homogène possible bien que l’hétérogénéité soit la règle dans le traumatisme crânien ; certaines déficiences doivent bien entendu faire l’objet d’une prise en charge individuelle.

Rééducation des déficiences motrices

Motricité volontaire

a) les paralysies apparaissent en général après une période de dystonie majeure qui précède ou accompagne l’éveil ; 80% des TC sévères en sont atteints au début sous forme de tri ou tétraparésies qui évoluent vers un syndrome hémiplégique de type pyramidal ; 50% des blessés récupèrent en 3 mois ; mais 10% n’évoluent plus après 9 mois et restent peu sensibles à la rééducation.

b) la spasticité ou hypercontraction durable des muscles parésiés ou paralysés, elle entraîne des attitudes vicieuses avec préférentiellement :

  • triple flexion aux membres supérieurs
  • hyperextension aux membres inférieurs, dont la composante la plus gênante est la position du pied pointant vers le bas et l’axe médian entraînant un steppage à la marche.

c) l’ altération des mécanismes de contrôle de la motricité volontaire :

  • dyskinésie (incoordination des mouvements) tremblements complexes intéressant le plus souvent l’hémicorps non déficitaire.
  • syndrome parkinsonien.

Ces troubles régressent souvent spontanément mais quand ils persistent, ils peuvent être plus invalidants que certaines paralysies.

d) la rééducation de la motricité volontaire fait appel :

  • aux mouvements en piscine.
  • aux mouvements induits par des jeux au sol, marche à quatre pattes, marche avec parallèles puis déambulation, marche à cloche pied etc…
  • contre la spasticité des traitements médicamenteux sont le plus souvent nécessaires :
    • baclofène par voie générale quand les symptômes sont légers ;
    • sinon baclofène intra-thécal (cad directement instillé dans le liquide céphalorachidien par un dispositif implanté), éventuellement complété par des injections sélectives de toxine botulique notamment dans les spasticités résiduelles du membre supérieur

Motricité automatique :

La motricité automatique est toujours très altérée dans le TC grave : il s’agit soit d’une déficience des ajustements fins chez les blessés agités, soit d’hypotonie (relâchement musculaire excessif) ou d’hypertonie (contraction excessive) chez les blessés akinétiques (très peu réactifs).

Il faut rééduquer rapidement cette motricité automatique, avant même la participation active et volontaire du blessé en sollicitant de façon prolongée et ordonnée tout la gamme des réflexes et des réponses complexes automatiques ; moyennant quoi la récupération se fait souvent de manière régulière et remarquable.

Les déficiences neuro-orthopédiques :

  • a) les para-ostéo-arthropathies (v. séquelles physiques du TC): formations osseuses qui se forment à proximité des grosses articulations.

Leur traitement passe au début par la glace, la mobilisation douce et les positions alternées pour éviter les ankyloses ; on peut aussi avoir recours aux anti-inflammatoires et à la radiothérapie ; enfin à l’exérèse chirurgicale mais avec un risque de récidive de 25%.

  • b) les rétractions musculo-tendineuses, quand elles n’ont pu être prévenues, doivent être traitées chirurgicalement.

En conclusion : 70 % des TC graves retrouveront une autonomie physique

Rééducation neuro-psychologique

Ce n’est donc qu’au stade de la rééducation investie que le blessé commencera à percevoir ses difficultés les plus évidentes (de mémoire et de langage surtout au début). Ce sera moins évident pour les autres difficultés cognitives qui ne se révéleront vraiment qu’à l’occasion d’un certain nombre de tests : Les premiers seront passés au centre de rééducation ; il s’agira d’abord de répondre à des batteries de questions et de réaliser un certain nombre d’exercices permettant au spécialiste (médecin ou neuropsychologue) de relever les points faibles et les points forts du blessé de façon très descriptive ; mais le plus souvent, cette enquête appelée « évaluation neuro-psychologique », sera complétée par une évaluation « dite écologique », pour repérer les difficultés du blessé en dehors de l’hôpital : dans la rue pour retrouver un itinéraire, faire des courses, cuisiner… s’organiser dans son intérieur pour ceux qui s’approchent de la sortie.

La situation sera bien-sûr très différente entre un blessé qui reconnaît parfaitement ses difficultés et est déterminé à y faire face et un autre très anosognosique (ne se rendant pas compte de ses troubles ou y étant indifférent) ; c’est pourquoi cette rééducation neuro-psychologique doit se faire, encore plus que la rééducation physique, dans une approche globale qui tient compte de l’ histoire du blessé et du projet de vie le plus pertinent pour lui.

a)Les troubles de la mémoire :

Sont de loin les plus constants ( v. séquelles invisibles).

La mémoire la plus atteinte est toujours la mémoire de travail ; elle sera renforcée par des exercices spécifiques qui ne peuvent être décrits ici car ils sont très nombreux ; retenir qu’il faut les associer dès que possible à des mises en application en situation écologique (c’est à dire dans les situations de la vie quotidienne et/ou de la vie professionnelle).

Cependant des troubles résiduels peuvent être irréductibles ; dans ces cas il faudra réadapter (cf plus haut) c’est à dire trouver des moyens de pallier cette mémoire défaillante en général par des carnets aide-mémoire à construire progressivement avec le patient.

b)Les troubles de l’attention et des fonctions exécutives :

Ne peuvent être séparés en rééducation car ils sont systématiquement liés dans les réalisations de tâches plus ou moins élaborées ; l’attention doit d’abord être éveillée par des tâches connues et routinières, puis en compliquant progressivement par des problèmes plus complexes (attention divisée par exemple c’est à dire sur 2 sujets à la fois) ; et en augmentant les durées attentionnelles pour réentraîner l’attention soutenue.

Cette rééducation de l’attention est alors couplée avec la recherche de résolution de problèmes globaux par des supports attrayants et dès que possible par une mise en situation de vie quotidienne.

c)Les troubles de la métacognition et des cognitions sociales :

La métacognition est la conscience de son état mental personnel mais aussi de celui des autres ; un certain nombre de TC graves ont beaucoup de difficultés à imaginer ce que pense l’interlocuteur (sur sa mimique par exemple) ce qui peut rendre les rapports sociaux difficiles.

Dans ces conditions le deuxième degré ou l’humour sont mal perçus ; mais le problème principal reste l’anosognosie avec surestimation de ses capacités et troubles de l’autocritique ; celle-ci doit être rééduquée en mettant parfois le patient en position de difficulté voire d’échec pour parvenir à lui faire comprendre ses erreurs ; en cas de non prise de conscience de ses déficits la rééducation du patient se trouve très empêchée dans tous ses domaines.

d)Les troubles de la parole du langage et de la communication :

Ne revêtent que rarement la gravité des aphasies des AVC ; il s’agit plutôt de troubles incomplets où l’élocution est ralentie, dysharmonieuse, mal coordonnée, utilisée sur le temps expiratoire et avec déperdition nasale.

La rééducation de ces troubles est le travail essentiel des orthophonistes ; il commence par le langage le plus utilisé antérieurement (professionnel notamment avant de l’étendre au général) ; en fait l’amélioration se produit souvent quand les difficultés initiales de compréhension s’atténuent.

En ce qui concerne les troubles de la communication (voie hachée, hésitante, silences volontaires, logorrhée, excès de familiarité, non respect de l’alternance du temps de parole) ils peuvent être en partie corrigés par des enregistrements vidéo pour faire percevoir les anomalies au patient puis en travaillant d’abord au calme avec un seul interlocuteur, puis avec plusieurs, puis en situation de distraction induite (hall d’hôpital par exemple) ; le travail en groupe avec interactivité est très utile dans cette rééducation.

e)Les troubles visuels ou de reconnaissances spatiales :

Relèvent de nombreuses méthodes trop nombreuses pour être citées ici.

f)Les troubles du comportement :

Relèvent d’une approche globale ; mais les thérapies cognitivo-comportementales individuelles sont intéressantes à la phase chronique, les neuroleptiques étant en principe réservés à des troubles aigus.

Très récemment et dans des cas choisis des essais sont tentés par une approche de techniques de méditation.

En conclusion :

Il faut garder en tête que l’approche globale met en avant des procédures centrées sur la personne, ses attentes, ses besoins, ceux de son entourage, plus que sur la résolution des déficits pris individuellement.

L’évolution psycho-dynamique passe par 5 phases qui s’étendent sur 6 mois environ :

  • phase de prise de conscience des déficiences
  • participation active aux conseils médicaux
  • phase de compensation cognitive quand le blessé s’aperçoit que ce qui lui est enseigné est utilisable dans la vie de tous les jours
  • phase d’acceptation de son état différent de l’état d’avant l’accident
  • phase de reconstruction d’identité

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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