Alexie et Agraphie

Résumé : Les alexies et les agraphies correspondent aux difficultés ou impossibilités de lire et/ou d’écrire secondairement à des cérébrolésions touchant les aires cognitives (neuropsychologiques) de la lecture et/ou de l’écriture et non aux aires visuelles proprement réceptrices des mots ou effectrices de leur écriture, même si des atteintes combinées sont toujours possibles ; elles sont traitées sur la même page car elles partagent nombre de points communs.

L’alexie est la difficulté ou l’impossibilité de lire les mots écrits et l’agraphie la difficulté ou l’impossibilité de les écrire ; il s’agit de deux pathologies dues à des lésions cérébrales acquises et non à des difficultés d’apprentissage pour lesquelles l’usage consacre le préfixe «dys» ; on parle alors de dyslexie et de dysgraphie ; comme pour les autres pathologies neuropsychologiques, les termes choisis plus haut excluent les difficultés d’ordre physiologique comme par exemple les troubles visuels et les troubles de la phonation pour la lecture, ou les troubles moteurs, visuels et auditifs pour l’agraphie.

Cependant les lésions cérébrales n’épargnent pas forcément les structures physiologiques précédemment citées et leurs séquelles peuvent associer les deux pathologies rendant souvent difficile ce qui peut par exemple revenir à une alexie et à une difficulté d’exploration visuelle associée ; de plus alexie et agraphie peuvent se retrouver intriquées chez la même personne du fait de leurs rôles complémentaires dans le langage ; si on y ajoute une association également fréquente avec une aphasie (impossibilité ou difficulté dans l’expression orale ou sa compréhension -v. page sur l’aphasie-) on peut imaginer que tirer au clair les responsabilités neuropsychologiques de chaque entité dans les difficultés de tel ou tel patient peut s’avérer redoutable ; et pourtant l’enjeu est loin d’être négligeable car la rééducation sera d’autant plus efficace qu’aura été compris le (ou les) mécanisme de séquelles paraissant très proches à un examen superficiel.

Nous présentons ici un tableau assez schématique des différentes alexies et agraphies en essayant de les relier à leurs causes les plus fréquentes ; il ne s’agit donc pas de donner un tableau exhaustif de tout ce qui peut se rencontrer dans ce domaine, et qui reste du ressort du spécialiste, mais d’essayer de faire comprendre comment l’altération de certaines fonctions cérébrales peut aboutir à telle ou telle séquelle, sans perdre de vue la complexité que peut entraîner leur association, ni le caractère imparfait nos connaissances actuelles.

A – Les alexies

1-L’alexie pure

Elle se caractérise par une impossibilité de lecture d’un texte écrit alors que le patient peut écrire presque normalement ce qu’on lui dicte ; mais sans pouvoir se relire ! La cause de cette alexie (fig 1) est liée à une atteinte du lobe occipital gauche (log) par AVC le plus souvent provoqué par une oblitération de l’artère cérébrale postérieure gauche (acpg) ; il faut que s’y ajoute une lésion du splénium (partie arrière) du corps calleux (scc) ou de la substance blanche avoisinante (sba) assurant la communication entre le lobe occipital droit (lod) et la région sémantique de la reconnaissance des mots (rsrm) qui se trouve à la jonction pariéto-temporale gauche tout près de l’aire de Wernicke (v. la page consacrée au langage). En effet dans cette situation, seul le lobe occipital droit a la possibilité de voir les mots et le barrage de cette communication (ligne orange) empêche leur déchiffrage.

L’alexie pure laisse souvent (mais pas toujours !) au cérébrolésé la possibilité de reconnaître les lettres composant les mots, mais de façon très imparfaite ce qui entraîne erreurs et fatigue causant l’alexie. Enfin la lésion occipitale gauche provoque souvent une hémianopsie latérale homonyme droite associée (perte du champ visuel du côté droit -cvd-) en lésant la partie terminale des voies optiques directe (vod) et croisée (voc) qui permettent normalement l’exploration de ce champ ; pour une meilleure compréhension voir les pages consacrées à la physiologie des voies optiques.

2-L’alexie par héminégligence gauche

L’héminégligence est un un trouble neuropsychologique caractérisé par la perte de la prise en compte d’un hémi-espace visuel, mais aussi souvent de la même demi partie du corps, et cela du côté opposé à la lésion hémisphérique ; ce n’est pas un trouble visuel mais bien un trouble neuropsychologique rencontré en cas de lésion pariétale, le lobe pariétal étant, entre autre, dévolu à l’exploration de l’espace intra et extra-personnel (v. page sur les agnosies spatiales) ; l’héminégligence se rencontre beaucoup plus souvent en cas de lésions pariétales de l’hémisphère droit (lphd – fig 2) que gauche ; les AVC en cause sont donc surtout sylviens droits. Quand ils sont étendus au lobe frontal droit (fréquent !) ils provoquent une hémiplégie gauche associée ; l’héminégligence gauche entraîne un phénomène très particulier sur la lecture, le sujet omettant de regarder la partie gauche des mots, donc dans notre écriture de gauche à droite, leur début, qui est alors non lu mais supposé ; ainsi le mot «fleur» pourra être lu «pleur» ou «coeur»; dans l’héminégligence droite, beaucoup plus rare, c’est la fin des mots qui sera au contraire négligé et donc inventé.

L’encadré de la fig 2 donne une idée des troubles lexiques (et graphiques – v. agraphies-) liées à une héminégligence gauche ; la partie gauche des mots (en vert) est négligée et le sujet invente une autre partie gauche (en rouge) qu’il pense compatible avec la partie droite lue correctement ; ce qui aboutit à un sens n’ayant plus rien à voir avec celui des mots initiaux.

3-Les alexies lexicales et les alexies phonologiques

Les neuropsychologues différencient les alexies lexicales des alexies phonologiques pensant, sur la base des constatations cliniques, que la lecture normale utilise deux voies complémentaires pour nous permettre de comprendre le sens des mots et des phrases ; nous devons en effet pouvoir retrouver immédiatement dans une sorte de lexique cérébral le sens des mots lus en nous servant de ce que nous avons appris au fur et à mesure et que nous gardons en mémoire dans certains territoires sémantiques ; nous avons vu dans la page consacrée au langage que les territoires sémantiques des mots entendus se trouvaient essentiellement en région temporo-pariétale gauche au contact de l’aire de Wernicke (AW-fig 3) ; ces territoires sont très voisins bien qu’anatomiquement non parfaitement cernés, du moins pour l’instant, d’autant qu’il s’agit plutôt de réseaux neuronaux que de territoires à proprement parler ; mais le fait que l’on puisse parfois, dans certaines conditions pathologiques, parfaitement comprendre des mots entendus et non des mots lus, ou l’inverse prouve que les réseaux desservant la lecture présentent une certaine indépendance par rapport à ceux desservant l’audition ; la voie qui permet au lecteur de puiser dans les mots appris a été appelée voie lexicale.

Cette voie est doublée d’une deuxième voie dite phonologique qui permet une lecture autrement, basée sur un déchiffrage utilisant la prononciation potentielle ou réelle des mots ; pour le langage nous avons vu que le sujet devait se servir de phonèmes qui représentent les plus petites unités du langage en ce sens qu’une lettre, ou l’assemblage de deux, doit provoquer une action unifiée de l’appareil bucco-phonatoire (v. page sur les aphasies) ; ces actions nous sont apprises par la lecture dans nos toutes premières années ; les phonèmes peuvent correspondre à des syllabes mais de façon très inconstante ; ainsi le mot «adresse» contient trois syllabes : a -dre -sse, mais 4 phonèmes : a -dr-e -sse ; or inconsciemment ce mécanisme nous sert aussi dans la lecture mentale que nous utilisons à tout instant ; en effet chaque phonème (expression orale) correspond à un graphème (expression écrite du phonème, et inversement) ; en lisant de façon phonologique nous pouvons nous libérer, en cas de nécessité, de la voie lexicale qui correspond aux mots appris ; ainsi certains mots, appelés «logatomes», parce qu’ils n’ont pas de sens particulier et que nous ne connaissons pas, du moins quand nous les voyons pour la première fois, ne peuvent être lus que par la voie phonologique ; ainsi le mot «raséro» ne veut rien dire, mais si nous utilisons la voie phonologique sa lecture ne pose pas de problème ; bien que la lecture des non-mots ait une utilité limitée il n’en va pas de même pour la conjugaison des verbes ; combien de fois, lors d’une lecture rapide par la voie lexicale, ne devons -nous pas revenir sur la forme conjugué d’un verbe en le détaillant phonologiquement pour bien comprendre le sens de la phrase qui peut varier considérablement suivant la conjugaison du verbe.

Nous voyons donc que ces deux voies nous sont presque indispensables, du moins pour une lecture fluide ; par ailleurs nous sommes amenés à lire à tout instant des mots dits réguliers, et des mots dits irréguliers ; les mots réguliers se lisent comme ils sont écrits ; pour eux la voie phonologique est adaptée : ainsi le mot «maladie» ne pose pas de problème par cette voie ; les mots irréguliers ne se prononcent pas comme ils sont écrits et doivent avoir été appris pour être lus ; ainsi en va -t-il d’une très grande quantité de mots, un des plus caractéristique étant par exemple le mot «oeil» ; les différentes langues ont des pourcentages très différents de mots réguliers et irréguliers ; une majorité d’irréguliers pour la langue anglo-saxonne ; l’inverse pour l’italienne ; l’entre-deux pour la française.

Les lésions responsables des alexies lexicales se situent dans l’hémisphère gauche, logiquement à proximité de l’aire de Wernicke (AW), premier maillon de la compréhension du langage parlé ; il s’agit en général de lésions de la région temporo-pariétale gauche allant de la partie inférieure de P2 aux supérieures de T1 -T2 ; les alexies phonologiques se rencontrent préférentiellement dans les volumineux AVC sylviens G (ASG) associant alors à cette alexie une aphasie de Broca (AB -aire de Broca) ou globale.

Les différences sémiologiques entre les deux alexies découlent des explications données ci dessus même si des intrications sont fréquentes eu égard à la proximité des réseaux neuronaux en jeu ; on peut schématiser ces différences ainsi :

Dans l’alexie phonologique la patient n’a plus à sa disposition que la voie lexicale ; il peut certes lire les mots qu’il a appris à connaître mais il a beaucoup de difficulté, voire l’impossibilité de lire les logatomes, c’est à dire les non mots qui nécessitent une approche phonologique puisqu’ils ne sont pas en mémoire ; mais surtout et plus grave il ne peut pas identifier un mot nouveau non connu (absent du lexique) ni l’explorer convenablement ; la lecture à voie haute est également perturbée car elle emprunte beaucoup à la voie phonologique qui sera ensuite retranscrite par l’aire de Broca pour former les phonèmes à la base du langage parlé ; les conjugaisons des verbes posent aussi problème, car bien qu’inscrites en mémoire, elles nécessitent une analyse phonologique pour retrouver les temps auxquels ils sont conjugués. La voie lexicale étant préservée mais les mots mal corrigés par le filtre qu’exerce la voie phonologique un mot peut être confondu avec un autre de la même famille sémantique : un «couteau» peut être lu «cuisine» par exemple car ces deux mots sont liés sémantiquement ; ces erreurs de lecture «à côté» du mot correct sont appelées paralexies.

Dans l’alexie lexicale le patient n’a plus à sa disposition le répertoire des mots appris ce qui nécessite pour lui une analyse phonologique graphème par graphème donc une lecture lente qui fait rapidement perdre le sens général de la phrase ; par ailleurs le sujet ne peut plus analyser les mots irréguliers, c’est à dire ceux qui ne s’écrivent pas comme ils se prononcent ; le mot «corbeille» se transformera en lecture phonologique en «co- r- bé -il -le» et n’aura plus de sens ; bien que moins fréquents que dans le langage anglo-saxon, les mots en français comprennent de nombreux mots irréguliers qui compliquent singulièrement la lecture dans cette variété d’alexie ; le patient confondra aussi les homophones c’est à dire les mots qui se prononcent phonétiquement de la même façon mais qui ont un sens différent : le mot «faim» se prononce comme «fin», mais si le mot ne peut pas être comparé dans le lexique il peut donc avoir les deux significations. L’alexie lexicale permet par contre de continuer à lire les logatomes, mots réguliers par définition.

Bien entendu toutes ces catégories d’alexies peuvent ne pas être aussi tranchées que tendraient à le faire croire les indications précédentes forcément schématiques ; par exemple les lésions responsables des deux alexies précédentes sont très voisines anatomiquement et il est obligatoire que certaines alexies partagent les deux mécanismes dans des proportions variables ; c’est tout l’intérêt de l’étude de chaque cas par un neuropsychologue spécialisé car selon chaque variété d’alexie la rééducation peut être différente.

B – Les Agraphies

Les agraphies au sens neuropsychologique du terme correspondent à des difficultés ou à des impossibilités d’écriture indépendantes de difficultés motrices, sensitives ou visuelles affectant les aires primaires et leurs effecteurs périphériques ; ainsi, comme dans le même esprit que celui concernant les alexies, les difficultés ou les impossibilités physiologiques, comme par exemple une paralysie d’une main ou un déficit visuel ne rentrent pas dans la catégorie des agraphies ; par contre une apraxie (difficulté d’exécution par mauvaise appréciation de ce qu’il convient de faire pour bien écrire), ou une agnosie visuelle (difficulté d’exploration de l’espace sans atteinte de l’appareil optique) en font partie.

L’écriture peut par ailleurs s’exercer de différentes façons ; manuellement, mais aussi en tenant un crayon dans la bouche ou entre les orteils ! Ou bien par dactylographie, voire en assemblant des lettres isolées mobiles dispersées sur une table ; ainsi quelqu’un qui ne peut pas utiliser ses mains mais qui écrit un texte parfaitement cohérent sans faute majeure avec un assemblage de lettres mobiles n’est pas atteint d’agraphie ; à l’inverse une personne qui écrit sans difficulté majeure mais qui intervertit les lettres dans les mots l’est ; on retrouve ainsi les explications de base données dans les aphasies et les alexies pour lesquelles on applique les mêmes principes ; ces différences non évidentes pour un non spécialiste doivent être bien assimilées pour comprendre les raisonnement à l’oeuvre en neuropsychologie.

Pour revenir à l’écriture il faut aussi signaler que celle-ci peut s ‘écrire de différentes façon : on parle alors d’ «allographies» pour les désigner ; on peut en effet écrire en majuscule ou en minuscule ; avec des déliés (écriture cursive) ou en bâtonnets, voire avec de nombreux autres styles ; ce détail a son importance car certaines agraphies peuvent concerner les allographies, certains sujets ne pouvant écrire qu’en minuscules ou en majuscules ou qu’en les mélangeant plus ou moins au hasard.

1- Les agraphies lexicales et phonologiques (fig 4)

Leur compréhension sera facilitée par la lecture des alexies lexicales et phonologiques décrites plus haut car elles sont basées sur le même principe : à savoir que l’écriture normale utilise deux voies initialement distinctes pour aboutir à l’écriture correcte d’un mot : une voie lexicale qui emprunte dans un lexique sémantique le sens et l’orthographe du mot et une voie phonologique qui permet de conforter la succession des graphèmes ; cette dernière étant indispensable pour l’écriture des mots inconnus du lexique , des «non-mots» (v.supra) et pour la conjugaison des verbes.

Les sujets atteints d’agraphie phonologique peuvent écrire les mots mémorisés dans le lexique mais ont beaucoup de difficultés avec la grammaire, les mots inconnus et les «non- mots» ; les mots peu utilisés couramment par le sujet posent également problème, car moins stabilisés sémantiquement, la seule voie lexicale peut s’avérer insuffisante pour les retrouver ; de plus l’utilisation de la voie lexicale sans contrôle phonologique peut faire faire des erreurs, le mot choisi étant alors un voisin sémantique du mot qui convenait ; ex : écrire «école» à la place de «professeur» ! Les lésions responsables se trouvent pour l’essentiel au niveau du gyrus supra-marginalis (gsm) et en arrière de la partie toute supérieure de la scissure de Sylvius (S) de l’hémisphère gauche.

Dans l’agraphie lexicale le sujet bute sur les mots irréguliers (cad ceux très nombreux qui ne s’écrivent pas comme ils se prononcent (ex. extrême comme le mot «oeil») la langue française bien que contenant moins de mots irréguliers que l’anglo-saxon n’en est pas avare !) ; par contre la personne atteinte de ce type d’agraphie écrit assez bien les mots réguliers (qui s’écrivent comme ils se prononcent), les logatomes (non-mots réguliers, ex «amabi») et peut aussi écrire assez bien les mots mal mémorisés car peu utilisés à condition qu’ils soient eux aussi réguliers. Les lésions responsables siègent surtout au niveau du gyrus angulaire (ga) de l’hémisphère gauche.

2- Les agraphies avec aphasies

Des agraphies peuvent se rencontrer au cours de toutes les formes d’aphasie, du moins celles pour lesquelles la répétition de mot est impossible ou perturbée (v. pages aphasies) ; dans l’aphasie de Broca qui atteint en principe assez peu la compréhension du langage, on pourrait penser que l’agraphie est rare, l’écriture se faisant par une autre voie ; la réalité est cependant différente si l’on met à part les difficultés motrices de la main droite du fait de l’hémiplégie droite souvent associée (AVC sylvien gauche) ; en effet les patients atteints de ce type d’aphasie ont souvent malgré tout des difficultés en écriture par assemblage de lettres (en principe non concernée par le handicap moteur) avec des erreurs de lettres dans la composition des mots et des difficultés orthographiques importantes ; constatations mettant sans doute quelques limites à un exposé se voulant très (trop?) rationnel.

A l’inverse les agraphies associées à l’aphasie de Wernicke sont en général en adéquation avec les troubles du langage de ce type d’aphasie avec une écriture bourrée de paragraphies (inversion de lettres dans les mots), de néologismes, d’erreurs de syntaxe et d’incohérence et cela malgré une aisance manuelle conservée (en l’absence d’hémiplégie droite associée).

3- Les agraphies apraxiques

Les apraxies sont des troubles neuropsychologiques caractérisés par des difficultés à se saisir et à utiliser des objets dans leurs usages habituels (v.page apraxies) et cela en absence de troubles moteurs : un peu comme si le sujet avait oublié à quoi sert tel ou tel objet et comment s’en servir ; une fois le stylo ou le crayon en main le sujet ne sait plus très bien comment l’utiliser ; les lettres sont déformées, oubliées ou interverties dans les mots alors que la copie peut rester correcte ; cette apraxie peut en effet être limitée à l’écriture, sans apraxie associée pour d’autres actions manuelles. Les lésions responsables sont pariétales gauches (fig 5- aa-), le mécanisme de l’agraphie relevant en effet de celui de l’apraxie idéatoire notamment.

Une forme étiologique particulière d’agraphie apraxique peut se rencontrer en cas d’atteinte de la partie antérieure du corps calleux : voir infra.

4-Les agraphies spatiales

Elles se rencontrent surtout dans les lésions pariétales de l’hémisphère droit (fig 2- lphd –)avec héminégligence gauche ; l’écriture est limitée à la partie droite de la feuille et est en général très déformée ; elle est le pendant de l’alexie par heminégligence (v.supra) avec oubli de la transcription de la partie gauche des mots notamment en copie ; une agraphie droite du même type peut se rencontrer en cas d’atteinte symétrique de l’hémisphère gauche mais elle est beaucoup plus rare.

5- Les agraphies de la main gauche

Elles sont en général liées à des lésions du corps calleux empêchant le transfert d’informations de l’hémisphère gauche porteur des informations nécessaires au bon déroulé de l’écriture vers l’hémisphère droit. On en signale ici deux variétés (fig 6) même si d’autres peuvent se rencontrer :

L’agraphie par blocage des informations de contrôle visuel (cv -région pariétale supérieure gauche) et somesthésique (cs -cortex sensitif primaire gauche-) nécessaires à une écriture manuelle correcte (double ligne noire) passant par la partie moyenne du corps calleux (pmcc) en direction de l’aire motrice primaire (ampd) de l’hémisphère droit ; dans ce type d’agraphie les lettres écrites de la main gauche sont très déformées, voire illisibles mais les écritures dactylographique et par lettres mobiles restent normales par cette main ; en effet le sujet sait très bien ce qu’il a à écrire mais ne sait pas le faire correctement de sa main gauche ; par contre il écrit très bien de la main droite.

L’agraphie par blocage des informations verbale et motrice de l’écriture (ligne orange) ; ces informations prennent naissance dans la région temporo-pariétale inférieure gauche et n’accèdent à l’aire prémotrice droite (apmd) qu’après être passées par celle de gauche (apmg) ; la traversée se fait à la partie antérieure (ou genou) du corps calleux (gcc) ; dans ces cas l’agraphie de la main gauche touche les trois types d’écriture : il s’agit d’une forme d’agraphie apraxique (pour plus de détails v. pages sur les apraxies et sur les atteintes des connexions hémisphériques).

Les agraphies de la main gauche sont particulièrement gênantes pour les gauchers dont l’aire du langage se trouve à gauche, cas le plus fréquent.

6- L’agraphie du syndrome de Gerstmann

Le syndrome de Gerstmann (v. page sur la somatognosie) associe une agnosie digitale, une indistinction droite gauche, une acalculie et une agraphie : le patient ne reconnaît plus ses doigts, notamment index, majeur et annulaire et ne peut pas les nommer ; il confond sa droite et sa gauche ; l’acalculie concerne à la fois le calcul mental et sa disposition écrite avec dispersion aléatoire des chiffres sur la feuille ; l’agraphie se caractérise par une inversion de lettres dans les mots et des mots inventés de toute pièce ; les lésions se situent dans l’hémisphère gauche entre le gyrus angulaire (ga) et la deuxième circonvolution occipitale (o2) fig 5

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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