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Bébés secoués

Le syndrome du bébé secoué (SBS), encore appelé traumatisme crânien non accidentel (TCNA) est une forme très particulière de traumatisme crânien car :

  • il survient chez un très jeune enfant : le plus souvent avant un an avec un pic de fréquence vers l’âge de 6 mois
  • il pose le plus souvent un problème médico-légal dans la mesure où l’acte responsable (le secouement ) reste un acte délibéré, même s’il est en général effectué sous le coup de la colère.

En effet le secouement est une réaction à un sentiment d’impuissance et d’horripilation devant un bébé qui pleure et que l’adulte ne parvient pas à calmer. Il n’y a pratiquement jamais d’enfant secoueur, du moins avant 10 ans, en raison du poids d’un nourrisson et de la force de secouement qui doit être appliqué pour provoquer des lésions cérébrales.

Cependant les caractéristiques morpho-physiologiques de la tête et du cou d’un bébé expliquent aisément la puissance de l’énergie cinétique qui est communiquée lors d’un secouement : la tête d’un nourrisson est en effet volumineuse et représente 25% du poids du corps tandis que les muscles du cou, très faibles, ne peuvent s’opposer aux mouvements de va et vient.

Fréquence du secouement

On dénombre chaque année en France 180 à 200 enfants victimes de secouement ; ce chiffre est sans doute très sous-évalué car seuls les cas les plus sévères sont amenés en consultation ; par ailleurs ce syndrôme est de connaissance médicale assez récente (travaux du Dr John Caffey en 1972) et mal connu de la population même si des efforts de sensibilisation sont faits actuellement notamment dans les maternités.

Les garçons sont plus souvent victimes de secouement, sans qu’il y ait d’explication tout à fait rationnelle.

Quelques facteurs favorisants sont relevés : prématurité, grossesses multiples…

Le responsable est le plus souvent un parent ( le père plus que la mère), le conjoint non parent biologique ou plus rarement la garde d’enfant.

Tous les milieux peuvent être concernés bien que la consommation d’alcool, la drogue et la violence intra-familiale soient des facteurs favorisants

Conséquences lésionnelles du secouement

le secouement provoque :

  • des déchirures veineuses à la surface du cerveau et donc des hémorragies méningées et des hématomes sous-duraux facilement repérables au scanner ou à l’IRM (le meilleur examen quand l’enfant est stabilisé) ; on peut voir parfois des lésions d’âge différent indiquant que le bébé a probablement été victime de secouements antérieurs passés cliniquement plus ou moins inaperçus.
  • des sections axonales suivant les mêmes principes évoqués dans le TC adulte et qui seront une des causes essentielles des déficits rencontrés plus ou moins tardivement chez ces enfants.
  • des hémorragies rétiniennes présentes dans 80% des cas et très caractéristiques du SBS quand elles sont multiples et profuses ; le diagnostic en est fait par l’ophtalmologiste.
  • des ecchymoses (hématomes superficiels) sont souvent rencontrés chez ces enfants témoignant d’une maltraitance supplémentaire éventuelle.
  • des fractures osseuses associées ne sont pas rares (certaines anciennes, d’autres récentes) justifiant des radiographies « corps entier » dans le cadre d’un bilan traumatologique complet.
  • des lésions cérébrales d’impact direct quand au secouement s’est surajouté un choc sur un objet contondant.

Ces trois dernières lésions ne sont évidemment pas liées directement au secouement mais peuvent donner une idée de la violence de certains gestes pratiqués.

Présentation clinique

En fonction de la gravité du SBS il peut s’agir :

  • décès dans les cas les plus graves impliquant une autopsie avec l’accord parental ; sinon la décision est prise par le Procureur de la République.
  • atteinte neurologique grave ; les signes sont en général de constitution rapide ou immédiate : malaise grave, troubles de la vigilance pouvant aller jusqu’au coma, apnées sévères, convulsions, plafonnement du regard.
  • signes plus discrets et retardés : moins bon contact, diminution des compétences de l’enfant, modification du comportement (irritabilité, troubles du sommeil, perte d’appétit), pauses respiratoires, pâleur anormale, bébé douloureux…

Problématiques propres au SBS

Bien entendu, devant ces derniers signes assez discrets (sans parler de ceux de haute gravité) entrant en cohérence avec un secouement récent connu ou suspecté le nourrisson doit être conduit d’urgence à l’hôpital car l’ évolution peut se révéler rapidement défavorable et nécessiter d’urgence un diagnostic lésionnel, des manœuvres de réanimation et/ou de neurochirurgie.

Le plus simple est d’avertir loyalement le corps médical de l’antécédent de secouement, ne serait-ce que pour faciliter les investigations et permettre la mise en route le plus vite possible du traitement adéquat.

Cependant l’expérience des équipes d’urgence savent que cet aveu est quelquefois difficile à obtenir : ce qui a deux conséquences néfastes : d’abord retarder le diagnostic et le traitement ; ensuite, dans le doute, d’obliger le médecin à un signalement judiciaire auquel il est absolument assujetti ; bien entendu le médecin ne fait jamais cela sans de forts éléments de présomption qui découlent notamment des examens complémentaires et des avis de son équipe (réflexion collégiale).

Conséquences à long terme du SBS

Celles-ci sont suffisamment importantes pour justifier la prise en charge la plus rapide possible des bébés secoués ; en effet ce n’est que depuis relativement peu de temps que l’on voit émerger les séquelles tardives dont certaines sont redoutables:

  • paralysies cérébrales
  • troubles envahissants du développement
  • déficience intellectuelle
  • troubles visuels
  • épilepsie
  • etc…

Certes, dans les cas graves certaines lésions sont d’emblée irréversibles; mais une prise en charge tardive ne peut qu’en aggraver les conséquences et les cas passés sous silence privent ces enfants de tout un arsenal de rééducation et de réinsertion (scolaire notamment) qui pourrait au contraire les minimiser.

Livre de référence sur le SBS :
« Le syndrome du bébé secoué » (traumatisme crânien non accidentel)
vers une convergence des interventions A. Stipanicic , P.Nolin et G.Fortin Ed : Presse de l’Université du Québec

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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