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Prévention du traumatisme crânien

La prévention des traumatismes crâniens fait partie des mesures essentielles de santé publique ; en effet avec 150.000 patients, dont 10.000 sévères, dénombrés chaque année par leurs passages hospitaliers, les TC constituent une cause majeure de décès et de séquelles graves notamment chez les sujets jeunes.

Incidence du traumatisme crânien en France

Cette incidence (nombre de nouveaux cas chaque année) estimée aux environs de 150.000 est sans aucun doute sous-évaluée car nombres de traumatisés crâniens légers ne consultent pas systématiquement. La représentation majoritaire de la population masculine est assez nette à tous les âges avec un pic différentiel très important pour la tranche 15-25 ans et deux pics moindres avant 5 ans et après 75 ans ; pour la première tranche cette différence s’explique essentiellement par la plus grande fréquence des accidents de la circulation chez les adolescents et les hommes jeunes.

Causes

Les accidents de la circulation et les chutes sont , en France, les deux causes principales ; mais elles évoluent : les premiers constituaient 60% des blessés hospitalisés en 1985 contre 30% pour les chutes ; actuellement elles ont tendance à se rapprocher grâce aux progrès de la prévention routière qui diminue le nombre d’accidents et du fait du vieillissement de la population qui augmente celui des chutes. Les deux autres causes importantes sont les accidents du travail et la pratique sportive. Les traumatismes crâniens par agression (armes à feu ou armes blanches, directs ou indirects ) sont une cause mineure en France, contrairement aux Etats-Unis où les lésions par arme à feu ont dépassé les accidents de la circulation !

Populations particulières

Les enfants

La grande majorité des TC de l’enfant résulte de chutes ; avant 2 ans c’est en général la chute d’une table à langer ou des bras de ses parents ; entre 2 et 5 ans il tombe de sa hauteur, puis du haut d’un meuble ou d’une fenêtre ; à partir de 6 ans il tombe en traversant la rue, de bicyclette ou à l’occasion d’activités sportives ; la part des accidents de la circulation augmente avec l’âge. Une cause très particulière de traumatisme crânien chez le très jeune enfant est la maltraitance avec le syndrome très particulier « du bébé secoué » ( cf Bébé secoué ).

Les jeunes

Les jeunes dans la tranche de 15 à 25 ans sont les plus concernés : ils représentent 13% de la population, mais 28% des personnes tuées sur la route. Les jeunes et surtout les garçons prennent plus de risques, les perçoivent moins bien et acceptent de toute façon des risques plus importants ; l’alcoolisation y joue très souvent un rôle favorisant , voire déterminant. Le traumatisé crânien grave est typiquement un garçon d’une vingtaine d’années, accidenté une nuit de WE , au petit matin au sortir d’une discothèque.

Les personnes âgées

Ont en principe des accidents moins fréquents mais cette notion est en train de changer car le nombre de chutes augmente de façon très importante du fait du vieillissement de la population. Par ailleurs la mortalité y est beaucoup plus élevée et croit de façon spectaculaire après 70 ans .

Les personnes défavorisées

De multiples observations suggèrent une forte surexposition de ces populations aux traumatismes crâniens ; il faut également noter que dans un nombre de cas significatif des conflits ou des drames familiaux précèdent la survenue d’un tel accident.On peut imaginer que des soucis graves non résolus soient un facteur de perte d’attention et de démotivation à la prudence.

Prévalence des séquelles

La prévalence des TC ( le nombre total de blessés avec des séquelles à un moment donné sur un territoire donné – la France en l’occurrence ) est difficile à estimer ; des études américaines évoquent une prévalence de 2000 sur 100.000 habitants ; si l’on rapporte ce chiffre à la population française, notre pays pourrait compter plus d’un million de patients souffrant des séquelles d’un traumatisme crânien à un moment donné !

PRÉVENTION

Les accidents de la circulation

Les mesures de sécurité routière ont considérablement fait baisser le nombre des accidents de la circulation : 17.000 tués en 1970 contre 3500 en 2015 ;alors que le parc automobile ne cesse de croître ! Au cours des 20 dernières années le nombre de tués a été divisé par 2 alors que la circulation a augmenté de 80%. Ces mesures restent cependant insuffisantes ; grâce aux progrès de la prise en charge des blessés le nombre de patients présentant de lourdes séquelles n’a pas diminué dans les mêmes proportions.

La prédominance masculine reste évidente : pour le même kilométrage parcouru deux tiers des victimes sont des hommes. Les décès par accidents de circulation sont en rapport pour :

  • 40% avec un traumatisme crânien
  • 35% avec un traumatisme thoracique
  • 10% avec un traumatisme crânien et thoracique.

Le trauma crânien est donc la première cause de mortalité en accidentologie routière puisque celle-ci approche de 50%.

La prévention primaire vise à éviter l’accident.

L’alcool

est un des tout premiers facteurs en cause dans les accidents de circulation; le taux d’alcoolémie le plus souvent rencontré chez les responsables d’accidents mortels se situe entre 1,6 et 2 g (rappelons que le taux maximum actuellement admis est de 0,5 g pour la règle générale et de 0,2 g pour les conducteurs détenteurs du permis probatoire). Un simple verre de vin , une coupe de champagne ,un « demi » de bière ou un apéritif servi dans un café restaurant peuvent déjà faire monter l’alcoolémie à 0,25 g soit au delà du taux maximum admis pour les jeunes conducteurs. Le taux d’alcoolémie monte très vite après l’absorption de la boisson alcoolisée et ne baisse ensuite que très progressivement: pour 1,5 g à minuit le taux peut être encore supérieur à 0,5 g à 10 h du matin ; ni boire de l’eau, ni manger (le taux monte un peu moins vite en mangeant), ni dormir n’influencent son retour à la normale.

La vitesse

est un facteur majeur de la gravité des accidents de la circulation et notamment du traumatisme crânien ;en mettant de côté l’évidence de son influence sur la diminution des distances de freinage et sur les possibilités d’évitement devant un obstacle, l’énergie cinétique du corps et donc de la tête est proportionnelle au carré de cette vitesse ; en cas de décélération brutale l’énergie emmagasinée doit se dissiper soit dans le choc lui-même s’il y en a un, soit dans les structures corporelles s’il n’y en a pas, soit le plus souvent dans les deux à la fois. Cette dissipation de l’énergie est particulièrement grave dans la boite crânienne, même en l’absence de choc direct ; en effet d’une part l’encéphale (le cerveau) est relativement flottant dans la boite crânienne grâce au liquide céphalo-rachidien qui l’entoure et le protège des petits chocs de la vie courante mais ce dernier est en quantité très insuffisante en cas de décélération violente : les parties les plus antérieures du cerveau (lobes frontaux et lobes temporaux) viennent alors se blesser contre la face interne du crâne; de plus le mouvement de va et vient dans la boite crânienne provoque souvent des lésions de contre-coup du côté opposé (lobes occipitaux). D’autre part les structures intra-cérébrales ne sont pas homogènes; en mouvement leurs énergies cinétiques ne sont pas les mêmes et lors de décélérations brutales ces structures glissent les unes sur les autres provoquant des déchirures profondes qui correspondent aux « lésions axonales diffuses » décrites dans les TC sévères; celles-ci ne sont que très partiellement visibles sur les examens d’imagerie, voire pas du tout; elles sont cependant facteur d’œdème cérébral à la période aiguë et de séquelles tardives peu prévisibles.

C’est dire que si les protections externes (ceintures de sécurité, appuis-tête, casques, air-bags) sont absolument indispensables et sauvent de nombreuses vies , elles ne sont pas un gage de protection suffisante lorsque le vitesse est élevée; tout au plus peuvent-elles éviter que les lésions soient plus graves encore .

Lorsque les vitesses sont modérées et notamment pour les conducteurs de deux -roues un casque adapté est une protection considérable ; mais encore une fois le casque ne protège pas du TC grave lorsque la vitesse est importante ! Obligatoire pour les deux -roues motorisés on comprend mal que cela ne soit pas le cas pour les bicyclettes qui du fait de leur faible vitesse devraient en tirer la protection optimale… Cependant il semble qu’une prise de conscience commence à poindre puisque le port du casque va devenir obligatoire en France pour les enfants de moins de 12 ans à partir de mars 2017 … Et cela malgré l’avis défavorable de certaines associations de cyclistes…Alors que le port obligatoire pour tous est déjà adopté depuis longtemps par de nombreux pays européens!

En ce qui concerne les deux roues on ne saurait trop insister sur l’importance du casque adapté « sur mesure » qui évite le ballottement du crâne source d’instabilité supplémentaire ; ce problème est particulièrement important chez les jeunes enfants notamment lorsqu’ils sont passagers d’un deux-roues motorisé ; faute de mieux, on les équipe souvent avec des casques d’adultes dans lesquels ils sont trop au large et qui surtout pèsent un poids trop élevé pour la musculature de leur cou favorisant la bascule avant-arrière de la tête particulièrement dangereuse en cas de décélération brutale ( coup du lapin qui peut-être mortel).

Enfin il faut faire la guerre à l’habitude de certains jeunes qui mettent un casque sans l’attacher sous le menton ; ce qui équivaut à ne pas mettre de casque du tout puisque ce dernier est expulsé avant que le tête ne vienne percuter l’obstacle.

Les drogues

En dehors de l’alcool de nombreuses drogues modifient le comportement des conducteurs; en premier lieu le cannabis qui peut passer pour une drogue légère est très souvent rencontré chez les conducteurs accidentés ; statistiquement il multiplie par 2 le risque d’être responsable d’un accident mortel; associé à l’alcool ce risque est multiplié par 15 !

D’autres drogues addictives (cocaïne, opiacés, amphétamines ) ont leurs effets propres et toujours dangereux.

Certains médicaments ont un effet néfaste sur la conduite automobile ; en principe ils sont indiqués avec un pictogramme spécifique (voiture noire dans un triangle rouge); de nombreuses classes sont concernées mais il faut faire une mention spéciale aux benzodiazépines (tranquillisants) en raison de la banalisation de leur usage et de la somnolence qu’elles peuvent entraîner.

Fatigue et baisse de vigilance

première cause de mortalité sur autoroute, la baisse de vigilance concerne 30% des accidents de véhicules légers et 60% des accidents de poids lourds; on en connait les raisons: hypovigilance passagère diurne, micro-sommeils avec fermeture des paupières, surtout nocturnes chez des sujets en dette de sommeil; les mesures de prévention sont connues mais imparfaitement respectées.

La prévention secondaire

vise à limiter les conséquences de l’accident

  • le port du casque est obligatoire pour les deux-roues motorisées ; on peut regretter qu’il ne le soit pas encore pour tous les cyclistes (cf plus haut); bien qu’il diminue nettement l’incidence des traumatismes crâniens il n’évite pas les lésions cérébrales sévères lorsque la vitesse est élevée ( cf plus haut). Le casque doit être choisi aux normes d’homologation , de taille adaptée (cf plus haut le cas particulier des enfants ) et n’ayant pas subi de choc ayant pu altérer sa solidité.
  • ceinture de sécurité et airbags : les mérites de ces deux moyens de sécurité sont largement établis. La ceinture diminue de plus de 50% le risque de mortalité; en cas de choc frontal les airbags frontaux diminuent de 20% ce risque chez le sujet non ceinturé et de 10% chez le sujet ceinturé; de 70% en association ceinture -airbags.

La prévention tertiaire

comprend toutes les mesures destinées à optimiser la prise en charge initiale depuis la relève du blessé;les premiers soins et le transport vers les centres les plus adaptés. Elle fait l’objet de protocoles systématisés régulièrement revus en fonction des nouvelles connaissances acquises au contact de ces graves blessés de la route.

Les accidents du travail

On estime une incidence de 3 traumatismes crâniens pour 1000 travailleurs exposés ; la proportion de TC graves est voisine de celle des accidents de la circulation d’autant que près de 70% des accidents du travail sont en rapport avec la conduite soit au travail soit sur le trajet de travail .

La pratique sportive

est une source importante de traumatismes crâniens mais davantage de commotions cérébrales que de TC graves; cependant les commotions cérébrales ne sont pas toujours sans conséquence (cf TC légers).

Parmi les sports de contact la boxe est le sans doute le plus à risque car le poing frappe avec une vélocité élevée et produit une accélération rotatoire dont les conséquences atteignent les axones des voies longues de la substance blanche et peuvent provoquer des lésions axonales diffuses; ces dernières souvent non visibles à l’imagerie peuvent être responsables d’altération secondaire des fonctions cognitives.

En pratique professionnelle les sportifs sont souvent protégés par des casques adaptés (vélo , ski , hockey, snow-bord , etc …) ; il n’en est pas de même chez les jeunes adeptes qui pratiquent trop souvent sans protection.

Enfin certains sports relativement violents (rugby par exemple mais aussi football , basket, etc…) se déroulent « tête nue » et les commotions y sont relativement fréquentes ; on sait qu’une première commotion cérébrale fragilise le cerveau et qu’une deuxième survenant peu de temps après peut créer des lésions plus graves; la prévention des commotions répétées est un problème qui retient toute l’attention du milieu sportif professionnel et qui donne lieu à un certain nombre de règles : quand faut-il sortir un joueur du terrain? Quand le laisser rentrer ? Autant de questions délicates en retenant que le simple bon sens commande de ne pas laisser rejouer dans la même partie un joueur qui vient d’être victime d’une commotion avérée. Les recommandations les plus récentes deviennent très restrictives incitant à l’absence de nouvelle exposition pendant les 6 jours suivant la disparition de tous les symptômes de la commotion passée.

Les chutes

Du fait du vieillissement de la population le nombre de chutes chez les personnes âgées a considérablement augmenté; souvent en cause une poly-médication avec un risque particulier pour les tranquillisants (les benzodiazépines notamment ) et les somnifères ( souvent de la même classe) auxquels cette population est particulièrement sensible : confusion, baisse de la vigilance et somnolence sont les conditions idéales souvent réunies pour occasionner des chutes de faible hauteur mais au cours desquelles un choc au niveau du crâne peut s’avérer catastrophique ; quand il s’agit de personnes seules le traumatisme peut même passer inaperçu pour les voisins ou la famille pendant quelques jours, l’hématome sous-dural subaigu ou chronique– très fréquent à cet âge – ne se révélant que par une torpeur ou des troubles du comportement inhabituels dans les jours qui suivent ; il faut savoir y penser d’autant plus si le patient est sous anticoagulant ce qui favorise encore davantage le risque de saignement pour un traumatisme apparemment bénin.

Chez l’enfant

les chutes ne peuvent pas toutes être prévenues ; c’est dire l’importance des casques de protection pour un certain nombre d’activités ludiques et notamment pour le vélo, les planches à roulettes, le ski ,etc…

Le syndrome du bébé secoué doit impérativement être connu des parents et des personnes en charge d’enfants en bas âge (cf page spécifique).

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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