AFTC, AFTC Gironde, Traumatisme crânien, Cérébrolésion, Documentation technique, Documentation pratique, Contact, Accompagnement, Nouvelle Aquitaine, Sud-Ouest, Dispositifs, Droits, Prévention...

Capacité civile et protection des biens

Les personnes cérébrolésées ont fréquemment des séquelles cognitives qui peuvent les empêcher d’exercer leurs droits en pleine responsabilité, et les mettre à la merci d’une atteinte à leurs biens.

Pour cela il existe toute une série de mesures pour les protéger ; ces mesures sont décidées par le juge des tutelles; elles ne sont pas spécifiques de la cérébrolésion. Le sujet de la protection juridique est difficile et nous tenons seulement à vous faire connaitre schématiquement les différentes mesures proposées par la loi et les procédures pour y aboutir; si ce sujet vous intéresse nous ne saurions trop vous recommander le livre « tutelle , curatelle , habilitation familiale » les guides pratiques pour tous ; Prat éditions écrit par E. Vallas-Leners ancienne avocate;  , remis à jour chaque année, donne des renseignements indispensables à connaître .

LES DIFFÉRENTES MESURES

Le processus de mise sous protection obéit au principe de subsidiarité ; il existe en effet des degrés croissants de protection et une des charges du juge est de mettre la personne vulnérable au niveau de la protection juridique la plus basse compatible avec sa sécurité afin de lui garantir le maximum de libertés individuelles résiduelles.

On trouve ainsi 4 degrés de protection possible , de la plus basse à la plus haute : la sauvegarde de justice, la curatelle, la curatelle renforcée, la tutelle. Deux autres mesures sont également possibles pour des circonstances plus ou moins particulières : l’habilitation familiale (mesure récente et très intéressante) et le mandat de protection future.

LA SAUVEGARDE DE JUSTICE

Est la mesure de protection la plus basse ; elle est la plus temporaire (1 an renouvelable 1 fois) ; elle sera donc suivie soit de la disparition de toute mesure soit du passage à une mesure plus haute.

Pendant la mesure de protection la personne reste libre de ses droits ; mais si elle fait une erreur d’ordre administratif , sa décision peut être annulée sans dommage pour ses intérêts ; par contre le juge des tutelles peut désigner en supplément un mandataire pour la protéger au mieux sur certains aspects de sa responsabilité civile.

LA CURATELLE

Le protecteur (ou curateur) assiste la personne vulnérable pour tous les actes importants ; mais il n’a pas la possibilité de prendre de décision à sa place , cette dernière restant libre de ses droits. Si le curateur estime que la personne vulnérable prend une mauvaise décision qui peut lui être préjudiciable il doit en avertir le juge des tutelles. La mesure de protection est valable 5 ans renouvelable.

LA CURATELLE RENFORCÉE

Elle renforce le pouvoir du curateur lorsque l’état de la personne protégée se dégrade ; le juge des tutelles donne au curateur un certain nombre de prérogatives notamment le plus souvent dans la gestion des comptes , mais le curateur (contrairement au tuteur) ne représente pas la personne sauf dans le domaine qui lui a été confié.

La demande de renforcement de la curatelle doit être faite auprès du juge des tutelles par le curateur , le procureur de la république , un proche…. ou la personne vulnérable elle -même.

LA TUTELLE

Est la mesure de protection maximale ; le tuteur représente véritablement la personne vulnérable :

  • devant la justice
  • sur ses biens (sauf grosses transactions notamment immobilières) ; en cas de doute le tuteur ne doit pas hésiter à demander l’avis du juge des tutelles.
  • mais pas sur des actes concernant la personne dans son intégrité (actes médicaux ou chirurgicaux par exemple), sauf si la personne se met en danger.

Durée de la tutelle : 5 ans renouvelable

Personnes en charge de la tutelle , soit :

  • Conseil de famille souhaitable vu la lourdeur de la charge : celui-ci comprend au moins 4 personnes dont le tuteur lui-même
  • Le tuteur seul en l’absence de conseil de famille ; mais c’est une charge très lourde
  • Association tuteur-subrogé tuteur (ce dernier étant choisi , si possible dans une autre branche de la famille pour obtenir un équilibre décisionnel
  • Professionnel mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM); celui-ci est rémunéré pour sa charge.

L’HABILITATION FAMILIALE

Mesure récente se proposant d’éviter le recours à un tiers dans les familles où règne une bonne entente. Cette mesure ne peut être prise par le juge qu’en cas de consensus familial.

La mesure est d’une durée de 10 ans et évite en principe les recours auprès du juge des tutelles pour obtenir différentes autorisations obligatoires avec les autres mesures; néanmoins le juge peut limiter le périmètre de l’habilitation , intervenir en cas de conflit porté à sa connaissance par certains membres de la famille et y mettre fin prématurément.

LE MANDAT DE PROTECTION FUTURE

Consiste à designer pour le futur une personne de confiance au cas où la personne vulnérable ne pourrait plus gérer ses intérêts personnels ; ce mandat peut être demandé par la personne vulnérable elle-même ou par sa famille si celle-ci en est déjà en charge (le plus souvent parents prévoyant de ne plus pouvoir s’occuper d’un enfant majeur handicapé en raison de leur âge).

Le passage par le juge des tutelles n’est pas nécessaire ; le mandat peut être établi avec ou sans avocat ; ou par le notaire (très souhaitable pour les problèmes d’enfants handicapés). Le choix du mandataire est très large (sauf médical). Le mandataire doit être enregistré auprès du greffe du juge des tutelles ; ce dernier peut être sollicité en cas de difficulté ou pour résilier le mandat.

PROCÉDURE DE DEMANDE DE PROTECTION

PERSONNES HABILITÉES À FAIRE CETTE DEMANDE

  • la personne vulnérable elle-même
  • le conjoint (sauf en cas de vie séparée)
  • un membre de la famille ou une personne entretenant un lien étroit avec la personne vulnérable
  •  le procureur de la république
  • le médecin de famille ou hospitalier pour les personne vulnérables dépourvues de famille ou en cas de famille défaillante (par l’intermédiaire du procureur)
  • pour l’habilitation familiale seulement les ascendants ou descendants et le conjoint (époux (se) pacs et concubin (e)).

LA REQUÈTE

Elle doit être adressée au juge des tutelles du tribunal d’instance le plus proche du lieu de résidence de la personne ou de l’endroit où elle est hospitalisée pour une certaine durée.

Ne pas hésiter à s’entourer d’un avocat s’il y a des conflits dans la famille!

Trouver sur le site du ministère de la Justice le modèle CERFA correspondant (différent pour l’habilitation familiale et les autres mesures)

LES PIÈCES OBLIGATOIRES

  • certificat médical rempli par un médecin agréé (la liste est fournie par le greffe du juge des tutelles) ; en 2018 ce certificat était facturé 160E +frais de déplacement ; il n’est pas remboursé.
  • nombreuses pièces administratives suivant les cas à traiter (pour plus de détails voir sur internet , au greffe du tribunal d’instance ou sur le guide signalé en début de page)

L’ AUDITION

En principe dans le bureau du juge en présence de :

  • la personne à protéger (mais il y des exceptions quand la personne ne peut pas se déplacer ou communiquer : dans ces cas le juge peut se déplacer au domicile de la personne)
  • une personne accompagnante souhaitée par la personne vulnérable
  • le futur protecteur
  • l’avocat s’ il y en a un.

LE JUGEMENT

  • est rendu en principe quelques semaines après l’audience
  • la notification du jugement est à lire attentivement car elle est personnalisée et indique le périmètre d’action du protecteur dans ses attributions (même dans les cas de tutelle)
  • En cas de désaccord il peut être fait appel du jugement dans un délai de 15 jours après la notification; il est alors conseillé d’être assisté d’un avocat.

RESPONSABILITÉ DU PROTECTEUR

  • insister sur la bonne lecture et l’adhésion aux textes élaborés par le juge ; en cas de doute sur une question il est toujours possible de revenir au juge des tutelles
  • il lui est conseillé de souscrire à une assurance spécifique
  • le principe de prudence doit toujours commander
  • les actes purement personnels de la personne protégée (lieu de vie , fréquentations, santé) restent du domaine de cette personne ; en cas de problème lié à un risque de mise en danger par la personne elle-même le juge des tutelles doit être sollicité ; en cas d’urgence essayer d’obtenir l’appui de membres de la famille ou de la personne de confiance (toujours souhaitable et qui n’est pas forcément le protecteur) ; mais le juge des tutelles devra être averti à posteriori.
  • ne pas oublier de faire la demande de renouvellement de la mesure de protection avant la fin de sa date de validité .
  • par ailleurs le protecteur peut à tout moment demander au juge des tutelles la modification de la mesure de protection (en plus ou en moins) s’il l’estime nécessaire.
  • Les proches mécontents de l’action du protecteur peuvent également solliciter le juge des tutelles.

LA PROTECTION DES BIENS

La protection des biens est bien sur un des points le plus susceptible de porter à litiges; le principe de prudence doit toujours être privilégié; mais il est possible d’indiquer un canevas pratique :

  • les actes courants sont du domaine de la personne protégée en curatelle , du tuteur en tutelle
  • les actes patrimoniaux importants sont du domaine de la personne protégée associée à son curateur en curatelle ;du tuteur associé au juge des tutelles ou au conseil de famille en tutelle
  • le protecteur ne peut être bénéficiaire d’un testament , d’une donation ou d’un avantage en nature quelconque qu’à la seule condition que cet acte bénéficie in fine à la personne protégée;dans tous les cas l’avis du juge des tutelles est nécessaire; cette possibilité est interdite aux mandataires de justice professionnels à la protection des majeurs et aux soignants (au sens large) qui se sont occupés de la personne protégée.

En espérant que cette présentation très schématique permette aux familles concernées pour la première fois au problème de la protection des majeurs de se faire une idée assez claire des différentes mesures et procédures; ce texte n’est qu’un résumé à compléter pour une information exhaustive.

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

Lecture(s) : 25