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La réadaptation

Cette page concerne les grandes lignes à mettre en place en fin (voir avant la fin) de la rééducation lorsque les séquelles paraissent fixées et qu’il y a peu d’espoir qu’elles ne se modifient sensiblement (encore qu’il puisse toujours y avoir des surprises chez les sujets jeunes notamment) ; mais il est un moment où on peut estimer qu’il devient plus utile de compenser les séquelles que de poursuivre une rééducation intensive afin de commencer à former un projet de vie ; c’est l’objet de cette page traitant essentiellement des traumatismes crâniens et des AVC. La proximité de certains problèmes fait que certains indications données pour un type de cérébrolésion peuvent être valables pour l’autre.

Réadaptation du traumatisé crânien sévère

On entre dans la phase de réadaptation quand l’état du patient est reconnu comme stabilisé ; cet état n’est pas toujours évident à préciser : c’est le stade où les séquelles sont reconnues comme fixées et en principe peu ou pas susceptibles d’évolution, donc de modifier le poids du handicap; il ne doit être fixé ni trop tôt, ni trop tard : trop tôt il risque d’empêcher le blessé d’exploiter l’ensemble de son capital évolutif ; trop tard de le focaliser sur la récupération des fonctions en retardant le projet de réinsertion.

Le blessé s’engage dans la phase de réadaptation par une crise psychologique qui peut aboutir à une rupture avec l’équipe jusque-là bien acceptée…

…Le patient doit s’engager dans un travail personnel d’acceptation dans lequel on peut repérer quelques étapes habituelles du processus de deuil…

…Le déni s’exprime par l’affirmation d’être comme avant et que le temps apportera la récupération totale ; mais quand la réalité s’impose, se manifestent des thèmes dépressifs de dévalorisation, de renoncement qu’il va falloir surmonter.

Le deuil de la famille est peut-être l’étape la plus difficile ; le déni est constant et durable ; la famille pense toujours qu’une récupération complète est possible et est prête à retirer le blessé du centre où il est pour un autre centre (moindre mal !) ou pour son domicile où risquent d’être prolongées des rééducations diverses quelquefois persécutrices. Le blessé, sans projet personnel ne peut plus être que le projet de la famille de le voir autre, c’est à dire comme avant.

Dans la plupart des cas la famille finit par admettre cette réalité, à accepter de participer au projet même si elle ne se résignera jamais totalement…

…Quant au blessé lui-même, il « renaît » avec une nouvelle personnalité qui est un mélange de celle antérieure et de celle imposée par un fonctionnement cérébral nouveau ; cette « renaissance » est peut-être mieux acceptée par le blessé lui-même que par la famille qui ne reconnait plus que très imparfaitement son proche d’avant l’accident. Le blessé, lui, est bien obligé de faire avec puisqu’il vit lui-même ces profonds changements et sa nouvelle personnalité « se moule » obligatoirement autour des altérations provoquées par les séquelles du traumatisme crânien. Il arrive alors que le TC lui même se retourne plus vers l’équipe que vers la famille pour que cette dernière ne soit plus l’oeil critique de première ligne.

C’est en fait en créant du lien social que progressivement cette personnalité nouvelle pourra retrouver un semblant d’équilibre après des phases de renoncement d’autant plus douloureuses (mais porteuses d’amélioration) que le blessé est plus conscient de ce changement. Dr E. Richer (extrait « des traumatisés crâniens de l’accident à la réinsertion »).

Bien entendu ces observations tellement pertinentes ne concernent que les traumatisés crâniens sévères ; les problématiques des traumatisés crâniens légers et des TC très lourds (EVC-EPR) relevant de considérations différentes.

Prise en charge

1) Les ressources humaines

  • a) L’équipe est en général composée de 2 ergothérapeutes, un auxiliaire médico-psychologique, un kinésithérapeute, une infirmière, un médecin et une assistante sociale pour 15 patients. Ce sont avant tout les ergothérapeutes qui évaluent les difficultés au centre et en situation réelle.
  • b) La famille est sollicitée quand le blessé peut renter chez lui le soir ou pour celles qui sont éloignées par des retours au domicile le week-end.
  • c) Le groupe des patients en réadaptation diminue l’anxiété et constitue la première étape de socialisation.

2) Le handicap

  • a) Sur le plan qualitatif les séquelles motrices graves ne représentent que 10% des cas, la spécificité du TC reposant surtout sur les séquelles cognitives et comportementales.
  • b) Sur le plan évolutif, le handicap est longtemps instable, non fixé et subissant l’influence favorable ou défavorable du milieu.
  • c) L’évaluation doit être réitérée à de nombreuses reprises et de préférence en situation de vie réelle pour apprécier les besoins en aide technique et en aide humaine.

3) L’action éducative vise :

  • a) L’autonomie domestique notamment avec les appartements partagés qui permettent la mise en commun de la salle de séjour et de la cuisine.
  • b) Les loisirs : Handisport, sorties, activités artistiques, activité de groupe ; toutes ces activités sont accompagnées par un thérapeute qui participe, observe et évalue et qui fait un bilan chaque semaine avec les blessés.
  • c) Un début d’insertion professionnelle quand c’est possible notamment avec des stages en entreprise ou en ESAT.

Cette période de réadaptation permet de définir le projet de vie qui doit répondre aux besoins du blessé et recueillir l’adhésion de l’entourage.

Réadaptation de l’AVC

1)Chez l’adulte

a) L’orientation

Chez l’adulte se pose en premier lieu le problème de l’orientation en fonction de la gravité de l’AVC et de l’âge du patient : ainsi les patients hémiplégiques de gravité intermédiaire ou graves mais relativement jeunes devraient pouvoir être pris en charge dans des SSR (services de soin de suite et de réadaptation) spécialisés en affections neurologiques.

Les SSR non spécialisés reçoivent surtout les patients fragiles, souvent polypathologiques et présentant des troubles cognitifs variés ; chez ces patients la rééducation neurologique passe en effet au deuxième plan du fait de l’altération importante de l’état général et des troubles de la conscience ; la rééducation doit être multidisciplinaire et modérée (moins de deux heures par jour).

Les SSR gériatriques sont la meilleure solution pour les personnes âgées de plus de 75 ans ; ces SSR peuvent aussi accueillir des patients plus jeunes avec l’accord de la commission de l’établissement.

L’orientation en EHPAD s’adresse aux personnes les plus âgées après avoir reçu leur accord ou celle de leur famille s’ils sont dans l’incapacité de se prononcer ; cette orientation concerne surtout les patients âgés isolés ou lourdement handicapés ; dans certains cas, lorsque la lourdeur des soins parait devoir se prolonger, le placement en unités de soins de longue durée (USLD) est la meilleure solution.

L’hospitalisation à domicile (HAD) peut être une alternative aux SSR lorsque les conditions sont réunies et notamment chez les patients ayant un projet thérapeutique d’orientation de situation : une prise en charge de réadaptation d’une durée de trois mois (renouvelable une fois) peut être demandée ; le patient bénéficie alors d’une équipe pluridisciplinaire coordonnée par le médecin MPR et en relation avec le médecin traitant ; à condition d’être bien organisée cette prise en charge est très proche de celle d’un SSR.

Le maintien définitif à domicile dépend bien entendu des possibilités familiales et du logement ; une aide financière doit être prévue le plus tôt possible auprès du département ; le patient peut bénéficier d’une équipe mobile pluridisciplinaire qui évalue, accompagne et oriente vers le projet thérapeutique le plus adapté. Les besoins de soin peuvent être assurés par des professionnels libéraux, des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), des services d’accompagnement médicosociaux pour personnes handicapées (SAMSAH) mais uniquement pour les personnes de moins de 60 ans : pour ces dernières l’accès aux droits doit être demandée à la MDPH.

Pour les personnes âgées de plus de 60 ans ce sont les centre locaux d’information et de coordination (CLIC) qui mandatent une équipe médico-sociale départementale pour l’élaboration d’un plan d’aide et l’attribution de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).

En l’absence du SAMSAH pour les personnes âgées de plus de 60 ans l’accompagnement social peut être assuré par les services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS).

Pour démêler toutes ces situations nous ne saurions trop vous conseiller de faire un appel au CLANA (centre ressource d’information pour les familles de cérébrolésés de Nouvelle Aquitaine) récemment mis en place pour expliquer et commencer éventuellement certaines démarches ; soit par mail, soit par téléphone ; vous trouverez toutes les coordonnées sur le site du CLANA. Les informations délivrées concernent toutes les variétés de cérébrolésions acquises.

b) La reprise du travail

Elle est envisageable pour un quart environ des patients ayant eu un AVC avant 60 ans. Elle est souvent complexe et dépend évidemment des séquelles qui permettront la reprise ou non dans l’activité antérieure ; une réorientation professionnelle peut se discuter en fonction de l’âge du patient, de sa motivation et du contexte socio-professionnel ; il faut néanmoins savoir que plus l’arrêt de travail a été long, plus la reprise sera difficile et éprouvante et que, au début, une reprise à mi-temps est plus que souhaitable ; en effet une reprise à temps complet peut s’avérer trop fatigante conduisant éventuellement à un nouvel arrêt de travail et quelquefois à une dépression secondaire.

c) La reprise de la conduite automobile

L’autorisation ne peut venir que de la commission médicale du permis de conduire ou d’un médecin agréé : c’est au patient d’en faire lui-même la démarche ; il faut en effet considérer que le permis n’est plus valable après un AVC et qu’en cas d’accident l’assurance ne sera pas engagée : voir document « Aide à la reprise de conduire » sur notre site.

d) Autres activités

Avoir eu un AVC n’est pas une contre-indication à partir en voyage, à prendre l’avion ou à pratiquer une activité physique : cette dernière, au contraire, a montré des bénéfices substantiels sur la marche, l’équilibre, la cognition, la fatigue, la confiance en soi et donc sur la qualité de vie ; bien entendu l’avis du médecin est souhaitable avant d’entreprendre un voyage fatigant ou une activité physique soutenue car de nombreux facteurs doivent être pris en compte et ils sont particuliers à chaque patient.

La reprise d’une activité sexuelle est tout à fait possible mais des dysfonctionnements sont fréquents surtout au début ; ils dépendent souvent de facteurs psychologiques (anhédonie, fatigue, inquiétude voir troubles dépressifs) plus que d’incapacités physiques dans le domaine sexuel. Moins évidents mais également gênants sont les troubles de la sensibilité et certains déficits visuels ; de plus certains AVC peuvent concerner des territoires spécifiques particulièrement impliqués dans l’acte sexuel : hypothalamus, cortex cingulaire par exemple ; les hémorragies méningées sévères peuvent altérer le fonctionnement de l’hypophyse et de sa sécrétion en hormones gonadotropes qui jouent un rôle essentiel dans l’imprégnation en hormones sexuelles ; tout soupçon dans ce domaine doit pousser à demander un bilan hormonal .

Ne pas oublier non plus le rôle néfaste de certains antiépileptiques, neuroleptiques, antidépresseurs et antihypertenseurs : c’est une éventualité dans laquelle un thérapeute attentif peut essayer d’atteindre le traitement de prévention optimale avec le moins d’effets secondaires possibles.

Enfin certains patients diminuent ou arrêtent volontairement leur activité sexuelle par peur que celle-ci puisse être une cause de récidive de l’AVC.

e) Prévention d’un deuxième AVC

Il est capital que le patient se soumette à une surveillance rigoureuse car le risque de récidive doit être écarté au maximum : voir « Prévention des AVC ».

2) Chez l’enfant

a) Évaluation de l’état post AVC

Elle doit être faite par une équipe multidisciplinaire entraînée et spécialisée dans l’atteinte neurologique infantile ; l’enfant ne doit pas être comparé à ce qu’il était mais à ce qu’il aurait du devenir en l’absence de lésion cérébrale.

b) La réadaptation

Elle doit viser à corriger les séquelles en utilisant tout le panel nécessaire médical et paramédical en fonction des besoins : kinésithérapeute, ergothérapeute, psychomotricien, orthopsie, orthophonie, psychologue ou psychiatre ; tous ces intervenants peuvent être utilisés à titre libéral ou dans le cadre d’une équipe : centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP), centre médico-pédagogique, service d’éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD), service de soins de suite et de réadaptation (SSR).

La prise en charge sera guidée par des évaluations régulières et se fera en lien avec la famille et l’école ; le médecin de médecine physique et rééducation (MPR) reste le coordonnateur principal mais il doit souvent faire appel à d’autres spécialistes : neuropédiatre (ex: épilepsie difficile à traiter), orthopédiste (indication d’appareillage), ophtalmologiste, pédopsychiatre (troubles du comportement). Enfin l’état général doit être surveillé (sommeil, alimentation, exercice physique : se méfier du risque d’obésité chez les enfants qui ont des difficultés motrices).

c) Les problèmes psychologiques; rapport avec les parents et retour à l’école

Ils se font jour au fur et à mesure de la reprise de l’activité de l’enfant dans la vie de tous les jours et plus particulièrement à la reprise de l’école ; paroles déplacées d’autres élèves ; mauvaise appréciation d’un enseignant qui ne connaîtrait pas les antécédents de l’enfant : à ce titre il est sûrement mieux de prévenir l’enseignant des difficultés de son enfant et des raisons qui les expliquent. Mais les rapports intra-familiaux peuvent aussi poser problème : d’abord avec les parents et le risque de surprotection notamment maternel qui peut gêner l’enfant pour se construire psychologiquement ; ensuite avec la fratrie car les frères et soeurs bien-portants peuvent voir dans les préoccupations de leurs parents un désintérêt à leur égard ; par ailleurs l’enfant handicapé peut vivre très mal ses difficultés par rapport à la facilité apparente des autres sur le plan intellectuel mais aussi sportif ; si bien qu’un soutien psychologique de la part d’un spécialiste doit être demandé sans arrière pensée pour chacun des membres de la famille qui se sent ou paraît en souffrance. Pour plus de détails voir les problèmes familiaux et scolaires posés chez l’enfant traumatisé crânien qui rejoignent ceux de l’enfant ayant eu un AVC même si les séquelles sont un peu différentes.

d) Prise en charge sociale

Elle nécessite que les parents aient contacté la MDPH pour définir leurs droits en matière d’aides de toutes sortes (financières, médicales, paramédicales et d’aides pour eux -mêmes et pour leur enfant handicapé) ; des allocations peuvent être alloués aux parents s’ils sont obligés de cesser momentanément ou définitivement leur activité ; les enfants handicapés peuvent bénéficier d’auxiliaires à la vie scolaire (AVS) ; quant à la scolarisation elle-même et bien que chaque enfant handicapé ait droit à être pris en charge en milieu scolaire ordinaire il peut être plus indiqué pour lui d’intégrer, ne serait-ce que momentanément, des structures plus adaptées à son état.

Éditorialiste
Dr François PERNOT

Médecin Chirurgie Générale retraité

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